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Plus d’1 million d’africains ont combattu aux côté des Alliés, durant la grande guerre

Devoir de mémoire, par Mireille Kasongo Munanga


Tableau "Hommage aux soldats congolais oubliés", by David Katshiunga



En ce 11 novembre, jour commémoratif de l’armistice, pallions un peu à la mémoire sélective qui oublie bien souvent, trop souvent, le rôle des vétérans africains pendant les deux guerres mondiales.



Durant la guerre 1914-1918, plusieurs milliers d’africains ont perdu la vie au nom d’une guerre qui n’était pas la leur.

Les chiffres ne concordent pas toujours selon les sources, mais environ 200.000 tirailleurs sénégalais se seraient battus sous le drapeau français et 30.000 d’entre eux auraient perdu la vie. [1]

Selon Philippe Bidalon, environ 550.000 africains au total auraient rejoint l’armée française.[2]


Un texte de Michael Crowder tiré de l’Histoire générale de l’Afrique, Volume VII, Editions UNESCO, nous rapporte que plus d’1 million d’hommes auraient été recrutés pendant la guerre pour compléter les effectifs, qu’en plus, des Nord-Africains, dont les algériens, ont dû remplacer, dans les usines, les ouvriers français mobilisés pour la guerre. En somme ce sont plus de 2,5 millions d’africains qui auraient d’une manière ou d’une autre participé à la grande guerre 1914-1918. [3]


Tandis qu’une partie de leurs pairs Blancs saluaient leur courage et leur volonté, d’autres les méprisaient, les jugeant inefficaces et inadaptés à une guerre moderne. [4]

L’armée américaine, ségrégationniste, aurait même fait la demande officielle à la France, d’arrêter d’utiliser les noirs, ne concevant pas que ces deriers combattent aux côté des Blancs. Les soldats africains ont en outre fait l’objet d’une propagande raciste et violente de la part des allemands, les tirailleurs ayant été victimes de massacres et d’exactions. Ils feront également objet de terribles expériences scientifiques lors de la seconde guerre mondiale. Des médecins auraient pratiqué sur eux, des recherches sur la tuberculose.[5]


Après la guerre, les survivants africains ne restent pas en Europe, notamment pour des raisons racistes. Blessés, mutilés, ils ne sont pas pris en charge, alors qu’ils touchaient déjà beaucoup moins que leurs compagnons d’armes français ; leur situation s’avère catastrophique, relève un rapport du général Raymond Delange en 1946.

Pour certaines régions comme l’Afrique orientale, la première guerre mondiale fut, pour reprendre les termes de Ranger, «la démonstration la plus effroyable, la plus destructrice et la plus capricieuse du “pouvoir absolu” européen que l’Afrique orientale eût jamais connue».[6]

Interrogé en 2015, à Kinshasa, par la Deutsche Welle, Albert Kunyuku, vétéran congolais, disait ne percevoir que 5.000 francs congolais par mois de la part de la Belgique, ce qui équivalait à l’époque à 5 euros. « De quoi être amer lorsque l'on a participé à la victoire contre le fascisme ». [7]


En sus de l’apport des soldats congolais à l’Etat belge, le poids économique, financier et géopolitique du Congo-belge s’est pourtant affirmé lors de la grande guerre ; le banquier du Trésor colonial durant la guerre était d’ailleurs une agence ouverte par la Banque Congo belge le 8 septembre 1914.[8]


En ce qui concerne la France, en 2001, un arrêt du Conseil d’Etat condamnera l’administration française pour avoir appliqué une différence de traitement entre les retraités en fonction de leur seule nationalité ; en 2003, il y aura une première revalorisation de retraites et de pensions des vétérans africains et en 2006, une décristallisation des pensions qui deviendra effective en 2007 et mettra ainsi fin, plusieurs décennies plus tard, à ces inégalités entre combattants français et étrangers. 30.000 personnes seulement seraient concernées (les soldats et leurs héritiers), alors que plusieurs centaines de milliers d’africains avaient combattu pour la France.


Suite à l’appel du président Macron aux maires français, à mieux faire sortir de l’ombre les combattants africains de la France libre, de les honorer en donnant leurs noms à des rues et places de leurs communes, parmi les rares actions de reconnaissance de l’implication des soldats africains lors des deux guerres, nous finirons par cette hommage du maire de Bandol, Jean-Paul Joseph, qui leur dédia une esplanade en 2020. Si l’initiative fut saluée par les habitants présents, le maire s’était d’abord heurté à quelques critiques.

"Ils sont nos libérateurs, ils sont Africains, ils sont nos frères morts pour la France", déclara-t-il "[9]




[1] https://www.nouvelobs.com/monde/afrique/20181109.OBS5169/30-000-tirailleurs-senegalais-morts-pendant-la-grande-guerre.html, consulté le 11 novembre 2021 [2] Entretien sur les troupes coloniales en 1914-18, L'Express-Histoire septembre-octobre 2014. L'EXPRESS, Philippe Bidalon https://www.lexpress.fr/actualite/politique/1914-1918-les-indigenes-dans-la-bataille_2046042.html, consulté le 11 novembre 2021 [3] https://fr.unesco.org/courier/supplement-numerique/premiere-guerre-mondiale-ses-consequences-afrique [4] Interview de Julien Fargettas, accordé à Leila Slimani, Jeune Afrique, https://www.jeuneafrique.com/134995/politique/histoire-qui-taient-les-combattants-africains-des-deux-guerres-mondiales/ , consulté le 11 novembre 2021 [5] Interview de Julien Fargettas, accordé à Leila Slimani, Jeune Afrique, https://www.jeuneafrique.com/134995/politique/histoire-qui-taient-les-combattants-africains-des-deux-guerres-mondiales/ , consulté le 11 novembre 2021 [6] unesco [7] Antonio Cascais, Konstanze Fischer, Les soldats africains oubliés de la Seconde Guerre mondiale, consulté le 11 novembre 2021 [8] Anicet Mobe, Le Congo, la Belgique et la Grande guerre 1914-1918 https://www.lexpress.fr/actualite/monde/afrique/le-congo-la-belgique-et-la-grande-guerre-1914-1918_1288104.html consulté le 11 novembre 2021 [9] https://www.lci.fr/population/video-nos-freres-morts-pour-la-france-sur-la-trace-des-soldats-africains-de-la-seconde-guerre-mondiale-hommage-archives-2161908.html


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